lundi 2 mai 2016

Journal d'un restaurateur (19)

Nous sommes de plus en plus souvent surpris par les « non réservations ». Pour la cuisine c’est toujours un défi. Ainsi vendredi, nous approchions les 20 réservations et nous nous sommes retrouvés avec 50 couverts à assurer. Cela s’est bien passé et finalement, nous avons eu une fin de soirée agréable avec plusieurs grandes tablées dont une de 8 jeunes femmes qui fêtaient l’anniversaire d’une des leurs. Samedi, ce fut plus calme mais quand même 37 couverts pour 12 réservations. Bon, ben, je pense qu’il faudra s’y faire et que les gens, surtout dans les 25-35 ans, préfèrent ne pas planifier. On voit très bien, que les personnes plus mûres ne veulent pas risquer de venir et de se retrouver confrontés à « plus de place » tandis que pour les plus jeunes le risque et l’impro leurs conviennent.
Samedi, à 23h30, tout le monde était parti, ce qui nous permettait de rentrer plus tôt et de n’être pas trop fatigués pour aller fêter l’anniversaire de notre petite Elsa…8 ans déjà. C’est la petite de mon fils Dimitri, qui est installé avec sa femme Delphine comme boucher traiteur à Braine Le Comte. Ce sont deux passionnés et cela se traduit parfaitement dans la qualité de leur travail.
Surprise ce dimanche : au lieu de nous faire le traditionnel entrée, plat, dessert ou le BBQ aussi traditionnel, ils nous avaient préparés, après toutes sortes de petites tapas délicieuses, des hamburgers!!! De vrais hamburgers qu’il nous fallait préparer nous-mêmes, avec des pains spéciaux, des sauces au choix, des salades et autres garnitures. Mais alors quels hamburgers !! Nous avions le choix entre celui au bœuf de salers ou celui au cochon ibérique. Evidemment, je me suis payé les deux et je ne fus pas le seul. Un pur régal. C’était beau de voir les grands parents de Delphine (près de 90 ans) se régaler de ces mets contemporains et complètement revisités. Quel beau dimanche
Dans un autre registre, nous avons eu beaucoup de compliments suite à ce qui nous était arrivés la semaine dernière avec le groupe de restaurateurs parisiens. A cette occasion, j’ai reçu une réaction de ma cousine Yvette qui m’a fait énormément plaisir. Yvette est ma cousine par alliance, elle a épousé Bruno Mancini, (un de mes oncles était Orlando Mancini qui avait épousé une soeur à ma mère) qui est originaire d'Azzinano, un hameau de Tossicia. Ils ont une très belle maison là-bas et leur terrasse se situe face au gran Sasso. Yvette me dit que Bruno peut passer des heures sur la terrasse à contempler la majestueuse montagne abruzzaise. Comme je le comprends. Moi de même, je ne m’en fatigue pas quand je suis là-bas. Je crois qu'on doit nous prendre pour des cinglés, mais on s'en fout, c'est trop fort.
Bon voici mon échange de messages avec Yvette. Elle m’écrit :   
« Nous sommes heureux et fiers pour vous deux. Vous le méritez, d'autant plus que vous n'avez pas pris " la grosse tête" et je vous envois le bonjour de Tossicia où nous sommes pour l'instant. A part Pasta e fogioli, (dont j’ai parlé avec Pino.NDRL) ici le 1er mai on, mange " le virtu "! Tu connais ? Bonjour à Marlène et saluto e abraccio di Rosanna ! (Rosanna est une autre paesana de Tossicia NDRL) »
J’en ai profité pour demander à Yvette (qui connait les Abbruzes mieux que moi)si elle pouvait m’en dire plus sur le « virtu » dont je ne me souvenais  pas et lui ai aussi demandé si c’était vrai qu’en Abrruzzaise, on dit scripelle au lieu de Cripelle en italien pour désigner les crèpes au bouillon. Sa réponse
« C'est vrai, on dit « scrippelle m'busse » (crèpes roulées autour du parmesan râpé, déposées dans une assiette et sur lesquelles on verse du bouillon de poule). Quant au " virtu ", c’est une préparation qui démontre le sens de l'économie des mammas abruzzaises qui a la fin de l'hiver vidaient les réserves de pâtes et de légumes secs, y ajoutaient les restes de jambon, lard, etc. faisaient cuire le tout en y mettant à mi-cuisson des pâtes fraîches comme des tortellinis ou autres et des légumes de printemps. Cela donne un énorme minestrone que toute la province de Teramo déguste le premier mai,...et aussi le reste du mois... Pratiquement tous les restos de la région le mettent à la carte ce jour-là. On peut aussi en emporter à domicile. J'essayerai de te procurer la recette officielle, mais chacun a sa recette de famille ! »
Quelle belle histoire n’est-ce pas. J’ai toujours dit que la cuisine est la plus belle traduction de la culture d’un peuple et de son environnement. 
Ah, que je serais heureux que vous puissiez goûter notre cuisine traditionnelle des Abruzzes, celle avec laquelle j’ai grandi : la pasta con fagioli, les scrippelles ‘m busse, i spaghetti à la chittara, la salsiccia nel grasso (saucisses conservées dans des vessies emplies de saindoux) et j'en passe et combien. Mais j’aimerais aussi que vous ayez un jour l’occasion de vous asseoir face au Gran Sasso, en dégustant un petit vin blanc frémissant comme le vinifiait mon zio Guerrino, (et dont je retrouve le goût dans un Lirac que je sers au resto et qui contient un cépage peu connu, le Bourboulenc) ou un Montepulciano aussi délicieux que celui que nous avons bu hier avec les enfants. 
Oh et puis je voudrais aussi qu’on puisse avec vous faire une immense fête à Pietra Camela, pas loin de Tossicia et classé parmi les plus beaux villages d’Italie. Sa place semble être une scène de théâtre et le village à l’arrière fait de ruelles, d'escaliers et de maisons imbriquées les unes dans les autres, un tableau représentant la splendeur de l’Italie rurale et montagneuse.
Bouhou !! Quelle nostalgie hein !!! Merci Yvette. Demain, je vous reparle de la soirée Barbara.

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