lundi 13 février 2017

Le cerveau et le larinx produirent l'humanité

J’achève mon histoire commencée il y a quinze jours. Je vous passe des détails et deux ou trois milliards d’années. Je ne vous raconté pas comment des molécules se sont accouplées, fusionnées, unies pour produire d’autres cellules plus complexes et plus riches. Les mutations ont été lentes mais constantes. La collaboration n’a jamais cessé. L’accumulation des mutations a permis à la nature de produire des chefs d’œuvre.
Il y a six millions d’années homo s’est séparé du chimpanzé et des primates. Ce qui nous sépare est le fait qu’Homo vit debout. (Les chimpanzés sont capables de se mettre debout mais pour de courts moments). On l’appellera l’homo habilis, il commence à fabriquer des objets à partir de galets, il crée le feu de camp (en récupérant les braises laissées par les incendies d’orage) qui lui permet de dormir tranquille à l’abri d’autres carnivores, il voyage et se déplace, l’Homo erectus se développe. Et il y a cent cinquante mille ans, apparaît en Afrique une nouvelle variété d’Homo. Ce qui est surtout nouveau c’est son crâne qui atteint mille quatre cent centimètres cubes, le double de celui d’Homo habilis. Le cerveau contenu dans ce crâne a déjà le même volume que le nôtre. Il va produire plus d’outils plus affinés, des vêtements qui lui permettront de résister au froid. Certains quittent l’Afrique et s’installent en Asie (il y a cinquante mille ans), d’autres en Europe (il y a trente-cinq mille ans). Homo erectus disparaît sous la pression de ces nouveaux venus, capables de s’organiser et de mettre au point des stratégies de chasse et autres : Homo Sapiens est né.
Outre le volume de son cerveau, un autre élément lourd de conséquence est changé : la position et la forme du larynx. L’air y passe à travers des cordes vocales, produit des vibrations capables d’être modulées grâce au mouvement de la langue et des lèvres. Des sons articulés sont possibles et vont donner naissance au langage.
L’existence du cerveau et du larynx va donner naissance à la véritable intelligence. Le cerveau humain de mille quatre cents centimètres cubes est riche d’environ cent milliards de neurones. L’homme dispose ainsi de deux fois plus de connexions qu’il n’y a de secondes dans quinze millions d’années. Au départ cette machine, s’il elle existe, n’est pas en état de fonctionner. Il faut un immense travail pour que les portes s’ouvrent, que les connexions opèrent, pour que le potentiel intellectuel se transforme en intelligence active. Pour cela il faut un apport extérieur. Les sens lui en fournissent, mais l’intelligence sensorielle ne concerne qu’un neurone sur cinq mille. Homo a besoin pour se construire sapiens d’autres choses que les données brutes que sont les couleurs, les sons, les odeurs et les goûts. La structuration du cerveau est donc le résultat de son propre fonctionnement. Mais pour s’autoconstruire, le cerveau a besoin d’une nourriture plus riche. Les sources les plus précieuses qu’il va trouver sont les cerveaux de ses semblables. La porosité la plus importante est celle qui donne accès au fonctionnement intellectuel de l’Autre. Ce qui permet cette porosité c’est le langage. Grâce au langage, on pourra se transmettre non seulement des connaissances et des informations, mais aussi des projets, des angoisses, des espoirs et des émotions. La transmission des savoirs va s’accélérer. L’homme va composer des phrases avec des mots et les autres seront capables de comprendre ces phrases, ces idées mais seront aussi capables de retenir et de ranger les mots de la phrase pour en faire d’autres phrases et émettre d’autres idées et concepts (on ne parle pas de Trump ici hein !!). Tout cela grâce à ce nouveau larynx. Il y a six mille ans, l’invention de l’écriture va permettre de communiquer à travers le temps et de stocker de la mémoire. Il y a un peu plus de cent ans la radio, puis la télévision va transmettre les informations à travers l’espace. L’informatisation et la numérisation va permettre un échange illimité de l’information.
Pendant longtemps l’évolution de la population humaine a simplement résulté d’un équilibre entre les naissances et les morts. Peu à peu son effectif s’accroît, d’abord à un rythme lent. Dix mille ans avant Jésus Christ, l’effectif n’est que de cinq millions d’êtres humains. L’agriculture va lui permettre d’atteindre un effectif de deux cent cinquante millions. Cela va rester ainsi durant le premier millénaire. Au treizième siècle, nous atteindrons quatre cent millions, puis huit cents millions au XVIII ième. Et puis les choses vont s’accélérer, le premier milliard est dépassé en 1825, le deuxième en 1925,  le troisième en 1960, le quatrième en 1975, le cinquième en 1987, le sixième juste avant l’an deux mille. Nous sommes aujourd’hui, en 2017,  sept milliards et demi d’êtres humains. On parle de onze milliards en 2050.
L’accélération de l’information et de l’intelligence a permis le développement et avec lui l’accroissement de la population. Il est possible aujourd’hui, si on le veut, de nourrir les sept milliards et demi d’habitants et ceux qui vont venir. Il faut pour cela que les révolutions technologiques soient mises au service de tous et que la richesse  produite soit répartie. Mais d’énormes dangers guettent la planète. La molécule, la bactérie a produit l’homme grâce à une collaboration sans limite, saurons-nous la poursuivre ?
Ainsi, après quinze milliards d’années, du big bang, de la poussière et des gaz est sortie une petite planète où s’est formée une purée qui par une infinité de coïncidences a donné vie à des structures toujours plus riches : des protons, des noyaux, des atomes, des molécules, la reproduction, la respiration, les espèces, le cerveau, le larynx, l’homme…doté d’un pouvoir qu’aucun autre n’a reçu : l’intelligence, le pouvoir de prendre le relais de la nature et de se charger lui-même de la suite des événements. Qu’en fera-t-il ?
Je termine par cette belle idée d’Albert Jacquard qui crée le concept d’Humanitude. « Plus que le passage de la nature à l’artifice c’est le remplacement de l’Humanité reçue par l’Humanitude construite qui décrit l’aventure humaine. Cette Humanitude allons-nous la dilapider ou la construire. L’homme d’aujourd’hui ne peut plus s’abandonner au cours naturel des choses en espérant que tout ira pour le mieux. Il ne peut plus prier des puissances extérieures. Il lui faut afficher ce qu’il veut pour demain regarder et gérer les contraintes. Il n’y a pas d’ailleurs accessible pour y vivre. Nous n’avons que notre planète. S’il en existe une autre elle est à des millions d’années lumières et donc inatteignable. On pourra glaner ici ou là des minerais et autres matières. Mais notre planète est le seul endroit où nous pouvons vivre, nous sommes assignés à résidence et son avenir dépend de nous. »

Allei, c’est pas tout ça mais j’ai du pain à cuire moi hein !!
(ce texte est largement inspiré du livre d'Albert Jacquard: La légende de la vie)

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