lundi 9 janvier 2017

Choses de la vie et lectures baroques

Même si nous nous voyons régulièrement et nous téléphonons une fois par semaine, cela fait bien longtemps que je n’avais pas passé autant de jours de suite avec mes deux fils. Cela remonte au séjour que nous avions organisé pour mes cinquante ans à Tossicia, le village d’origine de ma mère dans les Abruzzes. Nous y étions restés une semaine, mais il y avait là d’autres membres de la famille et quand on est aussi nombreux, les relations particulières sont plus difficiles à établir en profondeur. Ici le cercle était plus étroit : mes deux fils, leur épouse, leurs trois enfants, Marlène et moi. Un mélange de calme, de sérénité, de complicité, de bonheur d’être là ensemble et de savoir qu’on s’aime et s’apprécie sans devoir se le dire. Un mélange aussi de balade en campagne, d’histoires racontées aux enfants le soir près du lit, de repas familiaux (souvent bien arrosés), de dégustations de champagne, de piscines et rivières sauvages pour les enfants et de souvenirs que nous n’avons cesser d’évoquer.
Je regarde mes fils, je retrouve leur personnalité, mais ce sont aujourd’hui deux adultes, de bons pères, de bons époux qui avec leurs épouses, forment deux très beaux couples. Ce sont aussi des travailleurs reconnus pour leur capacité professionnelle et qui ont d’importantes responsabilités. Leur champ de connaissance et leur culture s’élargissent aujourd’hui indépendamment de moi. Je regarde aussi mes petits enfants dont les personnalités commencent à s’affirmer et avec Marlène nous nous disons que ce sont là de belles personnes qui se dessinent.
Tout cela apporte encore plus de sens à la vie. Nous nous rendons compte que les effets de ce que nous tentons de leur faire découvrir s’expriment avec le temps. Ainsi nos deux petites filles trouvent aujourd’hui naturel que nos excursions, qu’elles soient d’un ou de plusieurs jours passent presque toujours par un musée. (Celui de Reims, s’il n’est pas hyper riche, est assez éclectique et le carnet remis aux enfants est très bien conçu pour rendre leur visite active). Le petit Antonin demande à Marlène tel ou tel met espagnol. Nous n’avons pratiquement plus de remarques à faire sur leur comportement dans la ville, en société, au restaurant…Nous prenons nous comme eux plaisir dans nos bricolages, nos jeux, nos échanges. Nous sommes heureux de voir leur tolérance et leur ouverture aux autres. Nous nous connaissons et avons construit une relation de confiance naturelle. Nous nous disons que nous avons encore un beau bout de chemin à faire ensemble. La prochaine étape sera la découverte des Abruzzes et je me prends déjà à rêver qu’un jour, peut-être dans bien longtemps ils y retourneront et verront dans ce pays une petite part de leurs racines.
Voilà, avec mon dernier Douglas Kennedy (je dois en être au quinzième de ses livres) je quitte, au moins temporairement la littérature américaine et je reviens à mes anciens amours. Un coup de cœur : « Zinc » de David Van Reybrouck, que Yoann m’a offert pour la Noël. Un petit livre passionnant qui à travers l’histoire d’un personnage raconte surtout l’histoire de ce petit village, Moresnet, qui fut outre capitale mondiale du Zinc, tour à tour Etat indépendant, village prussien, hollandais, allemand et belge. Sa neutralité et surtout ses mines de zinc y ont attiré une population cosmopolite fuyant qui la Prusse, qui la Belgique, qui simplement des situations individuelles inextricables. On ne se souvent plus aujourd’hui de la présence du zinc dans notre environnement. Avez-vous connu les seaux, les cruches, les bassines et les contenants divers en zinc ? Les gouttières et les descentes de toit en zinc ? Et surtout, et c’est là que la production de zinc a explosé à Moresnet, rappelez-vous Haussman qui impose à ses constructions à Paris les toits de zinc dont il adorait le gris. Moresnet c’est ici tout près. J’y suis aller à divers reprises quand je travaillais à Verviers et voilà qu’il me revient en mémoire sous la forme d’un petit livre passionnant qui nous fait découvrir l’histoire dramatique et mouvementée de la région germanophone de Belgique et des drames que l’histoire a imposée à des villes comme Malmedy et à Stavelot.
Me voilà maintenant de retour en Europe centrale et particulièrement en Tchéquie où je m’étais rendu à plusieurs reprises avant et après la révolution de velours. Voilà que Yoann m’offre « Comment j’ai rencontré les poissons » de Ota Pavel.  Je ne connaissais pas du tout et je retrouve une écriture magnifique, des histoires qui coulent d’elles-mêmes et qui racontent une Europe centrale où se mêlent le rire et le drame, les juifs et les chrétiens, les braconniers et les gardiens des lois. Un bouquin qui me donne envie de reprendre Bohumil Hrabal et sa « Flûte enchantée » que j’ai lu je ne sais combien de fois et que j’avais fini par connaître presque par cœur. Je vous souhaite vraiment de lire Ota Pavel et ses poissons et si vous voulez découvrir Bohumil Hrabal, je vous conseille un de ses textes majeurs « Une si bruyante solitude ». C’est baroque et c’est fabuleux.

Allei, on est loin de la cuisine hein !! Je vous reviens la semaine prochaine.

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