mercredi 6 février 2013

lettre à ma tante


Chère tante, cara zia, querida tia,
J’espère que cette lettre te trouvera en bonne santé. Je t’écris peu ces derniers temps mais cela ne veut pas dire que je ne pense pas à toi. Simplement, je préfère pour t'écrire, prendre le temps et être dégager d'autres préoccupations.
Ici, tout va bien. Comme le diraient les panneaux de propagandes à Cuba : vamos bien. L'aventure du restaurant se poursuit et se développe selon nos attentes. Nous commençons à trouver notre rythme et à nous y habituer. Nous nous levons chaque matin à sept heures et descendons au restaurant prendre notre petit déjeuner en lisant la presse. (Nous n'ouvrons plus le matin à 7h30 comme au début, nous ne servons les petits déjeuners que sur réservation de minimum 6 personnes et dans ce cas, nous leur servons un petit dej. canon, ce sont leurs mots)
Vers 8h45, Marlène part travailler au Sips et ce du lundi au jeudi.Les vendredi et samedi elle se met au travail dés 8h30 et n'arrête que vers 23 heures.
Une fois Marlène partie, je me mets au travail et fait ma mise en place. Je termine la salle vers 15h ou 15h30 et passe alors à l’administration : les comptes, les commandes, les déclarations de toutes sortes. Je ne vais pas te parler des contraintes du resto car je n’en retiens en fin de comptes que les bons côtés. Et le bon côté du resto, ce sont les rencontres, les gens qui viennent, qui nous parlent ou qui ne nous parlent pas mais nous remercie d’un regard ou d’un sourire parce que grâce à nous ils sont avec un ami ou une amie et notre lieu et notre nourriture facilite la détente et la convivialité. Imagine une sortie avec quelqu’un et on te sert une mauvaise nourriture. C’est déjà un peu gâché la rencontre Non ?
Nous voyons des couples, en formation, se détendre au fur et à mesure que le repas avance et nous sommes contents de participer un peu, à faire leur bonheur. Tu sais pour des amoureux, si le repas est raté, c'est difficile de garder un bon souvenir de la soirée passée ensemble; Nous voyons des couples de tout genre revenir et espérer revivre cette soirée où ils sont tombés en amour comme disent les québécois.
Beaucoup de clients deviennent avec le temps des amis et nous avons l’impression de les connaître depuis toujours.
Bon, évidemment c’est crevant. Les « coups de feu » sont stressants et on en sort dans un état second. Nous vivons les dimanches comme des somnambules ou des zombies. Nous nous efforçons de sortir prendre un verre mais avons hâtes de rentrer, nous mettre dans le divan et somnoler en regardant la TV. Les soirées sans travail se passent dans le calme ou à table ou nous essayons de nouveaux mets.
Mais la nuit, au lit, revient le cinéma que je préfère. Celui où je revois les tables de notre resto. Je recompose les groupes, les couples, je revois l’endroit exact où ils étaient, je repasse dans ma tête les conversations, je revois leur expression quand ils dégustent un plat ou une entrée. Je revois leur regard et je sais qu’ils sont contents. Mais une seule remarque ou déception me fout parfois la soirée en l’air, surtout si elle est justifiée. J’essaye de trouver le juste milieu entre parler, écouter mais ne pas déranger et laisser les gens vivre leur soirée. Je rêve et tire des plans sur la comète, je rêve du jour où je n’aurai plus à travailler, je devrai juste vérifier que tout se passe bien, que les jeunes font bien leur boulot et le mien consistera juste à parler aux amis clients. Bon je sais ma tante, c’est pas demain la veille.
Malgré tout, nous aspirons à un peu de repos et rêvons de notre futur voyage en Inde. C'est tout proche puisque nous partons le 12 février. Nous allons découvrir un autre monde, fait de lumière mais aussi de noirceur. Nous sommes à la fois enthousiaste, curieux et avons un peu d’appréhension quant à la misère dont tous les livres nous parlent, De toutes façons je t'écrirai et te raconterai ma tante.
Voilà, nous sommes vendredi, il est 17h30 et Marlène travaille sans interruptions depuis 9h30 ce matin. Nous avons eu un bon service le midi mais assez étalé et maintenant elle fait sa mise en place pour le soir. Son obsession est de trouver des plats fins, bons, originaux mais qui demandent le moins de gestes possibles car au moment du coup de feu, quand il y a 12 ou 15 commandes devant elle, il n'y a pas une seconde à perdre.
Moi, j'ai trié les vidanges et ma salle est prête. Haythem va arriver. C'est notre nouveau commis. Il est Kurde d'Irak, il est travailleur, consciencieux, concentré, souriant et évidemment il adore la cheffe comme il dit. Il aime bien parler avec la cheffe (ils n'arrêtent pas d'ailleurs) car elle est psycologique dit-il.
Bon tante, j'ai été long et je m'en excuse. Si tu as des idées de plats pour nous, n'hésites pas à nous le dire. Tu trouveras dans le fond de l’enveloppe les trous de mes chaussettes, je te remercie déjà de me les repriser.
Nous revenons d’Inde pour rouvrir le resto le 1er mars. Si tu passes par Liège…
Je t’embrasse et Marlène aussi (elle t’embrasse aussi je veux dire et bien sûr je l’embrasse aussi. Enfin t’as compris quoi !!)

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