J’achève mon histoire commencée
il y a quinze jours. Je vous passe des détails et deux ou trois milliards d’années.
Je ne vous raconté pas comment des molécules se sont accouplées, fusionnées,
unies pour produire d’autres cellules plus complexes et plus riches. Les
mutations ont été lentes mais constantes. La collaboration n’a jamais cessé. L’accumulation
des mutations a permis à la nature de produire des chefs d’œuvre.
Il y a six millions d’années homo
s’est séparé du chimpanzé et des primates. Ce qui nous sépare est le fait qu’Homo
vit debout. (Les chimpanzés sont capables de se mettre debout mais pour de
courts moments). On l’appellera l’homo habilis, il commence à fabriquer des
objets à partir de galets, il crée le feu de camp (en récupérant les braises
laissées par les incendies d’orage) qui lui permet de dormir tranquille à l’abri
d’autres carnivores, il voyage et se déplace, l’Homo erectus se développe. Et
il y a cent cinquante mille ans, apparaît en Afrique une nouvelle variété d’Homo.
Ce qui est surtout nouveau c’est son crâne qui atteint mille quatre cent
centimètres cubes, le double de celui d’Homo habilis. Le cerveau contenu dans
ce crâne a déjà le même volume que le
nôtre. Il va produire plus d’outils plus affinés, des vêtements qui lui
permettront de résister au froid. Certains quittent l’Afrique et s’installent
en Asie (il y a cinquante mille ans), d’autres en Europe (il y a trente-cinq
mille ans). Homo erectus disparaît sous la pression de ces nouveaux venus,
capables de s’organiser et de mettre au point des stratégies de chasse et
autres : Homo Sapiens est né.
Outre le volume de son cerveau,
un autre élément lourd de conséquence est changé : la position et la forme
du larynx. L’air y passe à travers des cordes vocales, produit des vibrations
capables d’être modulées grâce au mouvement de la langue et des lèvres. Des
sons articulés sont possibles et vont donner naissance au langage.
L’existence du cerveau et du
larynx va donner naissance à la véritable intelligence. Le cerveau humain de
mille quatre cents centimètres cubes est riche d’environ cent milliards de
neurones. L’homme dispose ainsi de deux fois plus de connexions qu’il n’y a de
secondes dans quinze millions d’années. Au départ cette machine, s’il elle
existe, n’est pas en état de fonctionner. Il faut un immense travail pour que
les portes s’ouvrent, que les connexions opèrent, pour que le potentiel
intellectuel se transforme en intelligence active. Pour cela il faut un apport
extérieur. Les sens lui en fournissent, mais l’intelligence sensorielle ne concerne qu’un neurone sur cinq
mille. Homo a besoin pour se construire sapiens d’autres choses que les données
brutes que sont les couleurs, les sons, les odeurs et les goûts. La
structuration du cerveau est donc le résultat de son propre fonctionnement.
Mais pour s’autoconstruire, le cerveau a besoin d’une nourriture plus riche.
Les sources les plus précieuses qu’il va trouver sont les cerveaux de ses semblables. La porosité la plus importante est
celle qui donne accès au fonctionnement intellectuel de l’Autre. Ce qui permet
cette porosité c’est le langage.
Grâce au langage, on pourra se transmettre non seulement des connaissances et
des informations, mais aussi des projets, des angoisses, des espoirs et des
émotions. La transmission des savoirs va s’accélérer. L’homme va composer des
phrases avec des mots et les autres seront capables de comprendre ces phrases,
ces idées mais seront aussi capables de retenir et de ranger les mots de la
phrase pour en faire d’autres phrases et émettre d’autres idées et concepts (on
ne parle pas de Trump ici hein !!). Tout cela grâce à ce nouveau larynx.
Il y a six mille ans, l’invention de l’écriture va permettre de communiquer à travers le temps et de stocker de la
mémoire. Il y a un peu plus de cent ans la radio, puis la télévision va
transmettre les informations à travers l’espace.
L’informatisation et la numérisation va permettre un échange illimité de l’information.
Pendant longtemps l’évolution de
la population humaine a simplement résulté d’un équilibre entre les naissances
et les morts. Peu à peu son effectif s’accroît, d’abord à un rythme lent. Dix
mille ans avant Jésus Christ, l’effectif n’est que de cinq millions d’êtres
humains. L’agriculture va lui permettre d’atteindre un effectif de deux cent
cinquante millions. Cela va rester ainsi durant le premier millénaire. Au treizième
siècle, nous atteindrons quatre cent millions, puis huit cents millions au
XVIII ième. Et puis les choses vont s’accélérer, le premier milliard est
dépassé en 1825, le deuxième en 1925, le
troisième en 1960, le quatrième en 1975, le cinquième en 1987, le sixième juste
avant l’an deux mille. Nous sommes aujourd’hui, en 2017, sept milliards et demi d’êtres humains. On
parle de onze milliards en 2050.
L’accélération de l’information
et de l’intelligence a permis le développement et avec lui l’accroissement de
la population. Il est possible aujourd’hui, si on le veut, de nourrir les sept
milliards et demi d’habitants et ceux qui vont venir. Il faut pour cela que les
révolutions technologiques soient mises au service de tous et que la richesse produite soit répartie. Mais d’énormes dangers
guettent la planète. La molécule, la bactérie a produit l’homme grâce à une
collaboration sans limite, saurons-nous la poursuivre ?
Ainsi, après quinze milliards d’années,
du big bang, de la poussière et des gaz est sortie une petite planète où s’est
formée une purée qui par une infinité de coïncidences a donné vie à des
structures toujours plus riches : des protons, des noyaux, des atomes, des
molécules, la reproduction, la respiration, les espèces, le cerveau, le larynx,
l’homme…doté d’un pouvoir qu’aucun autre n’a reçu : l’intelligence, le
pouvoir de prendre le relais de la nature et de se charger lui-même de la suite
des événements. Qu’en fera-t-il ?
Je termine par cette belle idée d’Albert
Jacquard qui crée le concept d’Humanitude. « Plus que le passage de la nature à l’artifice c’est le remplacement de
l’Humanité reçue par l’Humanitude construite qui décrit l’aventure humaine.
Cette Humanitude allons-nous la dilapider ou la construire. L’homme d’aujourd’hui
ne peut plus s’abandonner au cours naturel des choses en espérant que tout ira
pour le mieux. Il ne peut plus prier des puissances extérieures. Il lui faut
afficher ce qu’il veut pour demain regarder et gérer les contraintes. Il n’y a
pas d’ailleurs accessible pour y vivre. Nous n’avons que notre planète. S’il en
existe une autre elle est à des millions d’années lumières et donc inatteignable.
On pourra glaner ici ou là des minerais et autres matières. Mais notre planète
est le seul endroit où nous pouvons vivre, nous sommes assignés à résidence et
son avenir dépend de nous. »
Allei, c’est pas tout ça mais j’ai
du pain à cuire moi hein !!
(ce texte est largement inspiré du livre d'Albert Jacquard: La légende de la vie)
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